République des Savoirs

Laboratoire transdisciplinaire du CNRS, ENS et du Collège de France

Gaëlle Pontarotti (Paris 1 Panthéon Sorbonne/IHPST), L’hérédité biologique : une métaphore à la recherche d’une théorie ?


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Les séminaires du Centre Cavaillès 2015-2016

Gaëlle Pontarotti (Paris 1 Panthéon Sorbonne/IHPST), L’hérédité biologique : une métaphore à la recherche d’une théorie ?

Pendant une grande partie du XXe siècle, la génétique a structuré les recherches consacrées à l’hérédité biologique. Pourtant, la mise en évidence de canaux d’hérédité non-génétiques – épigénétiques, comportementaux, écologiques, etc. – suggère depuis quelques années que la transmission des caractères n’est pas uniquement une affaire de gènes, et met ainsi à mal l’hégémonie d’une théorie strictement génétique de l’hérédité biologique. Dans ce contexte, plusieurs critiques invitent à repenser un concept clé dans les sciences du vivant et soutiennent que l’extension du champ de l’hérédité pourrait avoir une incidence significative sur la théorie de l’évolution par sélection naturelle. Je proposerai dans cette présentation une réflexion épistémologique sur un concept en mutation, et je soutiendrai plus précisément que l’hérédité biologique apparaît, en ce début de XXIe siècle, comme une métaphore à la recherche d’une théorie. Après avoir rappelé l’origine métaphorique du concept qui nous intéresse, j’examinerai plusieurs cadres théoriques qui, cherchant à conceptualiser une hérédité « étendue », définissent cette dernière en termes de transmission d’information, de mise à disposition de ressources développementales hétérogènes ou encore de réplication étendue. Je soulignerai tout d’abord les limites des approches qui, renouant manifestement avec l’esprit de la métaphore, semblent diluer le concept d’hérédité et perdre de vue le fait qu’il renvoie avant tout à un processus biologique singulier. J’évoquerai ensuite les limites des analyses qui, étant calquées sur la logique du réplicateur dérivée de la génétique, paraissent ignorer la spécificité des hérédités non-génétiques et passer ainsi à côté d’une véritable réévaluation théorique. Enfin, je proposerai quelques conditions nécessaires à la construction d’un cadre conceptuel élargi, avant de suggérer que l’un des enjeux de l’évolution du concept d’hérédité est d’établir un trait d’union entre une biologie développementale et une biologie évolutive cherchant toutes deux à s’affranchir de la logique du tout-génétique, et à renouer plus particulièrement avec une perspective organismique.