République des Savoirs

Laboratoire transdisciplinaire du CNRS, ENS et du Collège de France

Séminaire Cavaillès (2021-2022)


Détails de l’événement

Cet événement s’est terminé le 01 juin 2022


« Séminaire Cavaillès »

Cycle 2021-2022

13h30-15h30

Attention : les salles changent selon les séances

organisé par
Thomas Heams (chercheur à AgroParisTech), Gérard Lambert (médecin et journaliste) et
Caroline Petit (chercheuse au CNRS, République des savoirs et Centre Cavaillès)

Présentation du séminaire Cavaillès

Perpétuant les orientations impulsées par Jean-Jacques Kupiec lors de sa création, le séminaire Cavaillès se donne pour objet l’histoire et la philosophie des sciences du vivant. Une fois par mois un acteur des sciences expérimentales ou humaines est invité à y présenter ses travaux et réflexions. Le séminaire se veut ouvert à toutes et à tous, avec l’objectif de croiser les regards, partager les connaissances et favoriser les échanges sur un large spectre de thématiques et de questions. Il entend être le témoin de la vitalité, l’actualité et la fertilité des recherches en épistémologie historique des sciences biomédicales, ainsi que de leur incidence sur les débats scientifiques contemporains.

6 octobre 2021, Salle L et M-H SCHWARTZ (Info 2), sous-sol du Nouvel Immeuble Rataud – 45, rue d’Ulm, Paris Ve
Quelle biologie théorique pour penser la (dés)organisation du vivant?
Maël MONTÉVIL, chercheur Cnrs, USR3608-République des savoirs-Centre Cavaillès
Résumé :
La biologie théorique est rarement une discipline reconnue et discutée en tant que telle, et il est courant de confondre sa pratique avec la modélisation. Nous resituerons ce domaine dans l’ensemble de la biologie en insistant sur ses spécificités méthodologiques. Nous développerons certaines questions propres à la biologie théorique, notamment des pistes de recherches que nous poursuivons actuellement. Dans un second temps, nous aborderons une application qui est un enjeu majeur dans l’Anthropocène : la théorisation de la notion de disruption, utilisée informellement par de nombreux chercheurs en biologie et en écologie.

24 novembre 2021, Salle L378/L380, Bâtiment de Physique, 24 rue Lhomond – Paris Ve
Bio-objets et civilisation in vitro. La face cachée de l’anthropocène.
Céline LAFONTAINE, professeure de sociologie, Université de Montréal
Résumé :
À l’heure où l’on s’inquiète de l’avenir de la biodiversité, de nouvelles formes de vie éclosent chaque jour dans les laboratoires du monde globalisé. À mi-chemin entre le biologique et l’artificiel, les bio-objets (gamètes, embryons, cellules souches, IPS, etc.) sont les descendants directs des technologies in vitro qui ont permis de cultiver des cellules et des tissus vivants. Or ces entités biologiques sont, malgré leur omniprésence, des objets insaisissables dont la vitalité brouille de manière concrète le découpage culturel entre sujet et objet, entre nature et artifice, entre humain et non-humain. Dotés d’une très grande plasticité, ils peuvent être congelés, modifiés, transplantés, transportés et échangés. En quoi leur production croissante transforme notre rapport au vivant et à l’identité corporelle ? Quelles implications matérielles, économiques, sociales et culturelles sous-tendent leur prolifération ?

1er décembre 2021, 14h30-16h (horaire exceptionnel), Salle U209 (2ème étage), 29, rue d’Ulm – Paris Ve
La cellule comme concept simple, complexe, composé. Histoire d’une idée
Caroline ANGLERAUX, philosophe, post-doctorante au Labex Who am I?
Résumé :
En ce qu’elle permet canoniquement de distinguer les formes vivantes des non vivantes, la cellule est une entité biologique fondamentale pour définir la biologie en tant que science du vivant. Définie dans le cadre de la théorie cellulaire, elle appartient de plain-pied à la science empirique. Mais si la cellule est un concept positif qui bénéficie d’observations empiriques, elle incarne aussi l’idée de forme vivante minimale. En tant qu’entité élémentaire porteuse de vie, d’entité simple, la notion de cellule résulte aussi d’un important héritage métaphysique et spéculatif. Nous parcourrons cet héritage métaphysique et spéculatif en montrant comment un discours métaphysique sur le simple, articulé au complexe et au composé, s’est transformé en une biologie spéculative qui a joué un rôle majeur dans l’approche empirique revendiquée par plusieurs des auteurs du programme de recherche cellulaire. Articuler les concepts de simplicité, complexité et cellule dans cette histoire des idées permettra ensuite à la fois de réinterroger l’approche biologique dans laquelle le concept de cellule s’est développé et d’articuler les différentes acceptions cellulaires contemporaines.

5 janvier 2022, Salle U209 (2ème étage), 29, rue d’Ulm – Paris Ve
Xenobots, organoïdes : vers une techno-animalité ?
Thomas HEAMS, maître de conférence AgroParisTech, chercheur Inra
Résumé :
Depuis quelques années, des constructions de laboratoire défient les frontières habituelles de l’animalité. Des ébauches d’organes sont cultivées (organoïdes), des agrégats cellulaires sont conçus pour se déplacer, voire se diviser selon des modalités originales (xenobots). Ces productions esquissent des pistes nouvelles et des échelles nouvelles pour ressourcer la biologie de synthèse, jusqu’à présent principalement centrée sur les « circuits génétiques » d’êtres unicellulaires, et elles s’accompagnent d’un discours qui semble renforcer la métaphore de l’animal-machine dans la description des vivants. Or, cette métaphore est elle-même en crise, sous les feux croisés d’une biologie expérimentale plus intégrative et moins réductionniste, et de perspectives critiques en philosophie de la biologie. Ces nouvelles entités de laboratoires sont-elles la béquille d’une épistémologie dépassée du vivant, ou nous permettent-elles à l’inverse de mieux reconsidérer l’originalité de la biologie, et en particulier le territoire de l’animalité ?

2 février 2022, Salle U209 (2ème étage), 29, rue d’Ulm – Paris Ve
L’immunité ou la vie avec les autres
Marc DAËRON, immunologiste, Institut Pasteur
Résumé :
Élaboré par les immunologistes du XXe siècle pour rendre compte de l’immunité protectrice conférée par les vaccinations pasteuriennes, le système immunitaire s’est peu à peu mué en un système physiologique assigné à la défense de l’organisme. Ainsi conçu, le système immunitaire pose problème.

Pour un système défini par sa capacité à discriminer le soi et le non-soi pour épargner le soi, l’existence de maladies auto-immunitaires est une contradiction fondamentale. Pour un système d’auto-défense contre les pathogènes, les allergies à des substances de l’environnement inoffensives sont des aberrations. Et pour un système capable de mobiliser un redoutable arsenal contre le monde microbien, l’existence de plusieurs microbiotes au cœur de l’organisme est incompréhensible. Surtout quand on prend conscience que les microorganismes de ces microbiotes contrôlent davantage le système immunitaire que celui-ci ne les contrôle. Ces « anomalies » sont-elles le prix à payer pour la fonction vitale de défense que nous assure le système immunitaire, ou nous indiquent-elles que le système immunitaire n’est pas ce que nous croyons ?

Pour répondre à ces questions, je me propose de reconstruire ce système en partant de faits avérés et non d’effets escomptés : un système sans mission à remplir, sans surveillance à assurer, sans non-soi à neutraliser, un système sans causes finales et sans a priori. Ce système immunitaire apparaît alors comme un second système de relation. De même que le système nerveux s’occupe des relations de l’organisme avec le monde physique, le système immunitaire s’occupe des relations de l’organisme avec le monde vivant. Ce système perçoit toutes les molécules biologiques, qu’elles soient exogènes ou endogènes, appartenant au soi ou au non-soi, provenant de pathogènes ou de commensaux, et il leur répond. Plus que nous défendre contre les autres en les éliminant, un tel système nous permet de vivre avec les autres.
La vie avec les autres est en effet inévitable et nécessaire. Elle est inévitable non seulement à cause de tous ces autres qui vivent autour de nous, dont certains nous rendent malades quand ils ne nous tuent pas, mais aussi à cause de tous ceux qui vivent en nous et font partie de nous. Nous sommes en effet constitués de myriades d’organismes vivants rassemblés dans des « méta-organismes ». Nous sommes des chimères. La vie avec les autres est nécessaire parce que nous avons autant besoin d’eux qu’ils ont besoin de nous pour vivre. Nous sommes condamnés à vivre ensemble. Vivre avec les autres est ce que permet le système immunitaire qui nous adapte à eux et les adapte à nous. De cette accommodation réciproque résulte une immunité d’un nouveau type. Ni innée ni acquise car toujours remise en cause, dynamique, relationnelle, c’est un compromis sans cesse renégocié. Elle protège, sans aucun doute, mais elle n’évite pas toujours la maladie, elle la cause même parfois. La maladie est le prix de l’immunité. Car ce que permet le système immunitaire est bien plus essentiel que la défense de l’organisme, c’est l’existence même du méta-organisme que nous sommes. L’immunité n’est pas une protection, c’est une condition d’existence.
https://www.odilejacob.fr/catalogue/medecine/covid/immunite-la-vie_9782738155603.php

9 mars 2022, Salle Marbot (2ème étage), 29, rue d’Ulm – Paris Ve
Hérédité et épigénétique, données nouvelles  (Titre à venir)
Minoo RASSOULZADEGAN, Université de Nice Sophia Antipolis

6 avril 2022, Salle U209 (2ème étage), 29, rue d’Ulm – Paris Ve
Séance annulée

11 mai 2022, Salle U209 (2ème étage), 29, rue d’Ulm – Paris Ve
La biologie de l’indocilité
Patrizia D’ALESSIO, MD PhD, ancienne chercheuse en biologie cellulaire en médecine – professeure de biologie cellulaire (Universités René Descartes et Paris Sud-11, 1992-2012), fondatrice et présidente-directrice générale d’AISA Therapeutics
Résumé :
Nietzsche « comprend le corps vivant comme la mémoire en alerte, c’est-à-dire comme ce dans quoi la passivité (l’exposition passive au danger du nouveau) et l’activité (les mesures actives de réponse au danger) s’articulent originairement au lieu de s’opposer » (Barbara Stiegler, 2000). Sous l’influence de Virchow et de Roux (Roux, 1891), il nous parle d’organisme « qui sur base d’excitation par la nouveauté, est quelque chose qui pousse, qui lutte, qui se réplique et qui finalement meurt […]». A l’époque d’un intense intérêt de la société toute entière pour la longévité, serait-ce l’épuisement de la capacité de combat de la cellule, qui signe l’origine du mécanisme du relâchement extrême : « Lorsque le vivant tout entier est jeune », caractérisé par « des triangles tout neufs », il « jouit d’une forte cohésion de ses triangles entre eux, tandis que l’ensemble de sa masse est un solide tendre » [Platon, Timée].
Les récentes découvertes de la biologie cellulaire et notamment le concept de tenségrité développé par Buckminster Fuller et Donald Ingber (« Platon et la Tensegrité » Brepols 2007) –permettant d’imaginer la réversibilité du processus de la sénescence, soutenu par l’élasticité du cytosquelette- lancent un défi à la vision mécanistique de la biologie contemporaine et refondent en même temps l’entendement néo-vitaliste de Marc Kirschner (« Molecular vitalism, Cell 2000 »).
La conférence se veut une invitation à repenser le vivant (abordé par son caractère sinueux (« La Sinuosité du Vivant », Hermann 2012) à partir des observations biologiques caractérisant le phénomène de la sénescence cellulaire, central dans la compréhension du vieillissement, mais de façon plus importante semble-t-il, également de l’indocilité de la cellule.

1er juin 2022, Salles Lettres 1 et Lettres 2 (2ème étage), 45, rue d’Ulm – Paris Ve
Séance en cours de programmation

Nous remercions très vivement les services de communication et audiovisuel de l’ENS pour leur précieux concours.

Des archives sonores peuvent-être consultées.