République des Savoirs

Laboratoire transdisciplinaire du CNRS, ENS et du Collège de France

Titre de thèse :
« Vivre est-il un droit ?
Principe d’inertie et anthropologie moderne »

Directeur(rice)(s) de thèse :
Sophie Roux (ENS)

Année académique d’inscription (ED 540) :
2019-2020

Résumé
Avant le 16e siècle, vivre est un fait auquel on ne prête guère attention. Il passe, comme le dit Blumenberg, totalement « inaperçu ». Cela signifie que ce fait n’est pas directement thématisé. Il ne constitue pas un objet de réflexion.
A partir du 16e siècle, vivre devient un droit que l’on cherche à fonder. Par « droit », il faut entendre non seulement un droit théorisé par la philosophie politique, mais aussi un droit intégré, petit à petit, par les systèmes juridiques, à titre de norme fondamentale.
Le problème que ce travail entend examiner est le suivant : comment expliquer qu’un fait « inaperçu » soit devenu un droit que l’on cherche à fonder ?
Il s’agira de défendre la thèse suivante : l’idée selon laquelle vivre est un droit a été produite à partir d’un principe de conservation du mouvement qui semble se confondre avec le principe d’inertie, si bien qu’une norme morale et politique est l’effet d’une découverte de physique.
Pour établir cette thèse, trois gestes théoriques seront examinés tour à tour.
Premièrement, il s’agira de montrer que la découverte du principe d’inertie est l’effet d’une réappropriation de principes qui appartiennent à l’anthropologie scolastique et à la physique aristotélicienne, de sorte que la nouvelle philosophie rompt avec l’ancienne en s’en inspirant nettement.
Deuxièmement, il s’agira de montrer que l’idée selon laquelle les êtres vivants s’efforcent de se maintenir en vie, qu’on trouve chez Hobbes et chez Spinoza, est l’effet d’un transfert de ce principe mécanique d’inertie dans le champ de l’anthropologie.
Troisièmement, il s’agira de montrer que l’idée selon laquelle vivre est un droit est l’effet d’une conversion, chez Hobbes et chez Spinoza, de ce fait – les êtres vivants s’efforcent de se maintenir en vie – en droit naturel.
Il s’agira donc de montrer que la thèse selon laquelle vivre est un droit, thèse qui ne cesse d’être défendue à partir du 16e siècle, est l’effet d’une réappropriation, d’un transfert et d’une conversion.
Ainsi, ce travail de recherche sera l’occasion de réexaminer les liens entre ce qu’on a coutume d’appeler la « révolution scientifique » et l’anthropologie moderne.

 
Mots-clefs : Droit de vivre, inertie, conservation, conatus, instinct, Descartes, Hobbes, Spinoza
 
Curriculum vitae