Nicolas Correard, « “Humanisme”, ou animalisme ? Controverses sur l’animal à la Renaissance », Revue de synthèse, t. 143, 7e série, n° 1-2, 2022, p. 19-44.
Résumé : Les lettrés de la Renaissance ayant pris le parti de la miseria hominis ont parfois célébré, dans les pas de Plutarque, une paradoxale « dignitas animalis » (notion que nous proposons). Vanter l’excellence morale et intellectuelle des animaux ne relève pas seulement de l’exercice rhétorique, mais peut stimuler une observation originale de la réalité animale, dont témoigne le cas de Girolamo Rorario, au regard qu’on peut qualifier de proto-éthologique (nous analysons notamment ses anecdotes sur les chiens). On le voit pareillement dans une série de dialogues satiriques mettant en scène des critiques similaires de l’anthropocentrisme. Qu’il y ait eu matière à des premières polémiques sur l’animal, avant celles qu’engendreront le cartésianisme, le cas de l’Espagne le montre enfin, autour des thèses controversées d’Antonio Gómez Pereira. La notion confuse d’« humanisme » a peut-être occulté, aux yeux de l’historiographie moderne, les profondes remises en cause de l’échelle des êtres qui se jouent à la Renaissance.